vendredi 20 septembre 2013

Hommage à Louttre.B (1926-2012)

Actualités 2015 :


Exposition "le printemps des poètes" : Musée de Gajac - Villeneuve-sur-Lot (Lot-et-Garonne) du 6 Mars au 19 Avril 2015.

Le parcours artistique de Marc-Antoine Bissière, dit Louttre B. (1926–2012), graveur sur bois, est intimement lié à l'histoire du Musée de Villeneuve-sur-Lot et de ses collections. 
Deux tableaux ainsi qu'une gravure monumentale ont été acquis par la Ville dans les années 70 et 80. À la suite d'un protocole d'accord entre l'artiste et la ville, 266 gravures ont été données au Musée par phases successives de 1977 à 1989. 
Louttre B. voyait le monde en poète. Les sujets et leurs titres enchanteurs et facétieux nous invitent à un voyage onirique. 

Pour des raisons de fragilité et de conservation, les oeuvres sur papier, dont les gravures de Louttre B., ne peuvent être présentées de façon permanente. 


Louttre.B (1926-2012) est un peintre français reconnu pour l’utilisation d’une palette haute en couleur et toujours renouvelée. Également apprécié comme graveur, il imprime en couleurs ses gravures sur bois, s’étant rapidement affranchi des pratiques traditionnelles. Sculpteur, il ponctue son parcours d’artiste de diverses réalisations, surtout à Boissiérettes, lieu emblématique de son œuvre.


"Veilleur d'horizon " 2012 -Acrylique /Toile  150 x 150 cm


PEINDRE NATURELLEMENT


Ce qui frappe au premier regard devant les tableaux de Louttre.B, c’est la force de leur évidence, leur immédiateté et le plaisir qu’ils expriment. Louttre.B ne peint pas en partant de concept, projet ou convention de ou sur l’acte de peindre. Il peint du dedans de la peinture. Comme si ce médium était pour lui un mode d’expression aussi naturel pour exprimer l’être au monde, que peut l’être la parole, une procédure aussi simple que le fait de marcher. (…)
On a, de nombreuses fois, écrit que ses tableaux s’enracinaient dans les paysages de son Quercy natal. Il y a peu de chance cependant que le ciel du Quercy soit rouge ou jaune comme de la paille et que les sols soient bleus comme la mer. Si ciels ou sols il y a dans ses toiles. La référence de ces « paysages» serait plutôt intérieure. Même pas des paysages d’ailleurs qui resteraient aux plus près d’un souvenir, mais bien plutôt l’expression d’une poésie du sensible, de l’émotion. Les figures : silhouettes d’arbres ou de fleurs, quelques traits qui dessinent une maison, la rondeur possible d’une pomme ou l’ovale d’un citron, la courbe d’une colline, empruntent à des formes primitives, qui les conceptualisent. Elles ne se veulent pas évocatrices de sens ou assurer un rapport médiat au réel. Ce sont des stimuli qui partent de l’intérieur de la peinture, dont ils empruntent des codes : des facilitateurs d’émotions, des porteurs d’imaginaires. (…)
Jean-Paul Blanchet, 2009

extrait du communiqué de presse, exposition Louttre.B, galerie Bernard Ceysson, Paris, janvier 2010



Elément d'une biographie de  LOUTTRE B (1926-2012) 

Présentation
Louttre.B en 1982 imprimant une gravure
Peintre et graveur - Louttre B. a notamment élaboré une technique de gravure très personnelle avec une grande variété de couleurs, parfois de très grand format. La peinture de Louttre B. a la force de l’abstraction - c’est-à-dire le chemin vers l’essentiel avec des formes simples, des couleurs vivantes et chaleureuses - mise au service d’une figuration allusive. Ses œuvres expriment un sentiment de plénitude, une atmosphère picturale particulière qui nous permet d’adhérer à un fragment d’éternité du monde.






Louttre.B, est né le 15 juillet 1926 à Paris, où il passe son enfance dans une ambiance artistique qui modèle son esprit. Roger Bissière, son père, participe activement à la vie artistique de l’époque, notamment en étant une figure de l’académie Ranson, et côtoie des artistes comme Georges Braque, Henri Laurens, Louis Latapie et Amédée Ozenfant dans le cadre du Square Montsouris (Paris XIVe) où, à la fin des années 20, ils ont construit leurs habitations.

En 1938, les Bissière quittent définitivement Paris pour s’installer à Boissiérettes, près de Cahors (Lot), où ils vont vivre au plus près de la nature. Au cours de la guerre, nombre d’amis artistes viennent leur rendre visite à Boissiérettes, parfois s’y réfugient, alors que Bissière a cessé de peindre et que Louttre.B s’adonne à des travaux agricoles pour subsister.

En 1944, démobilisé, il retrouve Boissiérettes et son père, qui se remet à peindre. S’ouvre alors une période marquante pour Louttre.B au cours de laquelle les deux hommes sont inséparables, le père suivant son fils dans les travaux des champs ou de débardage de bois. En peinture, ils partagent le même atelier dans des recherches à quatre mains et, en octobre, il expose pour la première fois à la galerie de France à Paris avec Bissière et plusieurs de ses amis.

En 1947, il présente une œuvre au tout jeune Salon de mai et ne tarde pas à s’installer à Paris où il vit grâce à des travaux de peinture en bâtiment. Là, il côtoie peu le milieu artistique de l’immédiat après-guerre. Il se lie avec Nicolas de Staël. Il revient très régulièrement à Boissiérettes, seul endroit où il peut peindre sereinement. Sa démarche s’inscrit alors dans des recherches abstraites dans lesquelles les rapports colorés sont sa principale préoccupation.

À partir de 1955, Louttre.B expose régulièrement, à la fois dans les salons (Salon de mai, Salon des réalités nouvelles, Salon d’octobre), et également dans plusieurs galeries parisiennes (Nina Dausset [1955], John Craven [1955], Pierre Loeb [1957], Jeanne Bucher [1959]).

En 1961, il est lauréat de la deuxième Biennale de Paris et la galerie Jeanne Bucher présente sa première exposition personnelle l’année suivante, reprise à la galerie Beyeler à Bâle, et accompagnée d’un catalogue préfacé par Jacques Lassaigne.

À ce moment de son parcours, Louttre.B éprouve le besoin de faire évoluer sa manière. Il assombrit sa palette et réintroduit des figures sommaires dans ses toiles. Dans le même temps, il découvre, avec Marcel Fiorini, la gravure sur bois de fil où toutes les couleurs sont ancrées sur une seule plaque de bois contrairement à la gravure sur cuivre qui demande un passage en presse par couleur. Il en résulte des tirages aux couleurs lumineuses, dont chaque épreuve est différente.

En octobre 1962, à la mort de Mousse, sa mère, il revient s’installer à Boissiérettes auprès de son père qui décède deux ans plus tard (décembre 1964). Louttre.B cesse alors de peindre durant près de deux ans et investit un bois proche de la maison familiale où il installe un groupe de sculptures monumentales en béton dont les figures rappellent celles de ses derniers tableaux.

Dans le même intervalle, il restaure la chapelle de Boissiérettes : il recouvre le sol d’une mosaïque de galets, peint le plafond, réalise des vitraux et installe une tapisserie composée de fils de laine brodés derrière l’autel en béton sculpté.

De retour d’un séjour au Portugal, Louttre.B reprend la peinture et introduit du sable dans ses toiles. La figuration s’affirme, tout en restant allusive, la couleur se simplifie. Mais c’est par la gravure qu’il diffuse son travail, notamment en étant lauréat de plusieurs biennales internationales (Tōkyō et Grenchen en 1967, Épinal en 1971), ce qui l’amènera à expérimenter le tirage de très grandes planches (200 x 300 cm) qu’il exposera à la galerie Jeanne Bucher en 1970.

Revenu s’installer à Paris en 1968, sa vie se partagera dès lors entre Paris et Boissiérettes.

Bientôt, Louttre.B entreprend le cycle des Enseignes dans lequel il fait ouvertement référence à l’art populaire. C’est à cette époque qu’il monte un stand de gaufres au Salon des réalités nouvelles (1972), qu’il réalise des jeux de cartes (Le Tarot des familles, 1976) ou qu’il installe ses Girouettes à Boissiérettes (1978).

À partir de 1976, Louttre.B peint à l’acrylique des tableaux de format carré sur lesquels l’application de jus successifs, souvent poncés, donne un caractère lisse et transparent à ses toiles. Des paysages à peine suggérés, encadrés dans la couleur, accentuent la nature intemporelle de la peinture, seuls les titres en forme de calembour semblant rétablir un lien avec la réalité. Dès lors, Louttre.B présente régulièrement son travail dans plusieurs galeries à Paris, chez Fabien Boulakia en 1979 avec un catalogue préfacé par François Mathey, et à la galerie Le Troisième Œil (Bordeaux et Paris) depuis 1988.

En 1983, Louttre.B fête ses vingt ans de gravure avec la parution d’un livre qui répertorie les quelque 442 planches réalisées depuis ses débuts. Dans le même temps sa peinture évolue. Toujours au format carré, les tableaux hauts en couleur sont formés de plans imbriqués liés par un réseau de hachures.

Au début des années 90, dans une ruine en contrebas de Boissiérettes, appelée la Villa Dominique, Louttre.B réalise une mosaïque, un vitrail et une fresque et y installe plusieurs sculptures en béton. Il tire de nouvelles grandes gravures.

À la même période, après un bref retour à la peinture à l’huile, Louttre.B réintroduit le sable dans sa pratique picturale. Outre la matière, il donne à ce grain une profondeur en mélangeant sable et pigments, dans des compositions où le paysage laisse place à des formes toujours en phase avec une nature rêvée. L’exposition « Pages de sable » au Centre d’art contemporain de Mont-de-Marsan (1991) illustre cette évolution qui prend tout son sens lors de la rétrospective organisée en 1996 par la maison des arts Georges Pompidou à Cajarc.

Se succèdent alors des séries de tableaux comme Campagnes de l’an II (2001) ou Les Licornes (2003) dans lesquelles la figure ne semble plus être qu’un prétexte à la superposition de plans colorés. Cette dernière série est présentée largement lors de l’exposition de 2003 au musée de Sens à qui, dans le même temps, l’artiste fait donation de 458 de ses gravures, couvrant la période allant de 1983 à 2003.

Depuis 2009, Louttre.B expose à la galerie Bernard Ceysson, à Paris et au Luxembourg, des peintures où le grand format lui permet de déconstruire les éléments formels du paysage en de violents assemblages de couleurs.

Il s'éteint le 6 Avril 2012 à Paris.


NB : L'ensemble des textes cités sont extraits de la page Louttre.B de la Galerie Bernard Ceysson.
Courtesy Galerie Bernard Ceysson


Retrouvez la video du film de Marc Christian (prod FR3 Reg) de 1976 Louttre.B entre le Père et la Terre, ici.
Le 29 octobre 1976
Rencontre avec Marc-Antoine BISSIÈRE, dit LOUTTRE, peintre, graveur et sculpteur, interviewé dans la maison familiale de Boissierette dans le Lot où son père, le peintre BISSIERE, prit sa retraite volontaire et laissa les signes de sa présence. Après nous avoir parlé de l'influence que son père a exercée sur lui, LOUTTRE nous livre sa conception de l'art, sa passion pour l'imagerie populaire et ses propres recherches artistiques. Dans le petit bois de chênes, près de la maison familiale, il nous présente une étrange sculpture de mégalithes, symbole de son désir inconscient de lutte contre l'angoisse de la disparition. Tantôt au volant d'un tracteur en train de transporter des pierres, tantôt dans son atelier, il poursuit toujours sa recherche picturale personnelle, colorée, ironique et amusée. Nous pouvons voir, entre autres, le plafond de la chapelle qu'il a décoré et de nombreux plans sur ses sculptures, peintures et gravures. 

Images d'archive INA /Institut National de l'Audiovisuel.


Et le film de 2013 de Loup Lebreton, son petit-fils Louttre.B à St Libéral là.


d'après le reportage de Corrèze-TV (2007) - image de Patrick Petit et Christine Jubertie.