mercredi 11 juin 2014

Le cinéma peut-il être abstrait ?

Interrogation (autour et) avec l'abstraction dans le dernier film de Jean-Luc Godard "Adieu au Langage". Les questions de la nature de l'image ayant toujours taraudé JLG : "qu'est ce qu'une image ? qu'et ce qu'une bonne image ? qu'est qu'une image juste ?" et les problèmes de la peinture (De Stael dans Pierrot le fou, Cézanne) ... par celui qui fut un critique acerbe du salon des Réalités Nouvelles et de l'abstraction ... la peinture renonce à être elle-même écrivait-il dans Arts dans les années 50…. Couleurs saturées, contrastes exagérés et simultanés, formes cassées, effets informels, déréglage volontaire de la correction gamma, sur/sous-exposition alternée, 3D explosée,  le grand broyage des codes de l'Image… Un film apologie de la peinture, langage cinétique et métaphore 

Bande-Annonce officielle : combien de citations de peintres saurez-vous reconnaître ? Grand Nu descendant l'escalier ? Ciel ? Tache ? De Stael ? Duchamp ? Cézanne ? Courbet ? Mathieu ? Hartung ?...

Extrait de l'interview donné à Philippe Dagen et Franck Nouchi dans le Monde du 10 Juin 2014 :
Jean-Luc Godard : « Le cinéma, c'est un oubli de la réalité »

PD/ FN : Dans Adieu au langage, à un moment, il y a une boîte de couleurs, de l'aquarelle. Faut-il en déduire que, pour vous, peindre, c'est un des derniers langages qui existent ?
JLG : J'avais fait cela en espérant que quelqu'un, pour lui-même, penserait qu'il y a là quelqu'un qui a un encrier et de l'encre – le noir, l'impression –, et puis, de l'autre, il y a une boîte de couleurs. Penserait que, d'un côté, il y a le texte, et de l'autre, l'image. Ici, si on était tous les deux, je prendrais plutôt une boîte de couleurs, et puis, vous, je vous laisserais l'encrier. Les gens me demandent ce que ça veut dire. Moi, je filme un état de fait.
PD/ FN : Dans les « Cahiers du cinéma », vous aviez interrogé Robert Bresson sur l'importance de la forme. La première chose qu'il vous a dite, c'est : « Je suis peintre »…
JLG : Il était peintre, oui. Je n'ai jamais vu ses peintures. (…) J'aime utiliser l'image de plonger et de remonter à la surface. On part de la surface et on va au fond. On remonte ensuite… Des choses comme ça…
PD/ FN : Pialat aussi avait pensé qu'il allait devenir peintre…
JLG : Son Van Gogh est un très très beau film. Le seul, sans doute, qu'on ait pu faire sur l'art. Je n'aime pas tout chez lui, et puis il était difficile de caractère. Souvent, quand les cinéastes essaient de filmer les peintres, c'est une catastrophe ! (…) C'est l'histoire de la nature et de la métaphore. La métaphore n'est pas une simple reproduction, une image, c'est autre chose.
PD/ FN : Dans le film, à de nombreuses reprises, vous faites des expérimentations techniques sur l'image. Ce que font les artistes vidéo, ça vous intéresse ? 
Bill Viola, vous allez le voir au Grand Palais ?
JLG : Non, je déteste. Tout comme Bob Wilson. C'est du scénario. Du texte écrit, mis en image, souvent brillant…